L’idée du rationnement individuel de gaz à effet de serre ou de l’énergie fait son chemin dans les esprits ! En témoignent les prises de paroles médiatiques d’intellectuels et personnalités politiques sur le sujet.
Quand les gilets jaunes font de l’écologie
Novembre 2018, les Gilets jaunes rayonnent sur les rond-points, sur les Champs-Elysées mais aussi dans les cerveaux de tous ceux qui veulent limiter à tout prix les émissions de gaz à effet de serre ! “Non à l’augmentation du prix à la pompe!” Si chaque augmentation de la fiscalité sur les carburants suscite une petite révolution, ça risque d’être… compliqué.
Tic – tac, l’horloge climatique tourne, et les taxes “classiques” ont perdu de leur superbe.
En juin 2019, Socialter interroge Mathilde Szuba, maître de conférence en sciences politiques : “plutôt qu’une taxe, un quota pour chaque citoyen?” La carte carbone, idée largement développée outre-Manche au début des années 2000 perce le mur du son politique. Relativement méconnue du grand public, l’idée semble faire son chemin à travers les quelques experts qui s’en font l’écho.
Pour convaincre la Convention Citoyenne pour le Climat de se pencher sur l’idée, l’économiste Pierre Calame rédige et fait publier un opuscule dessinant les contours d’un compte carbone global.
Quoi qu’il en coûte : le compte carbone dans le champ des possibles
En 2020, la pandémie de coronavirus s’abat sur les sociétés du monde entier comme le ciel sur nos têtes. Abasourdie, la France se confine comme la plupart des pays occidentaux. Tout semble alors à nouveau possible : pour le bien de tous, nous pouvons faire l’effort de “rester chez nous”. Pourquoi ne pas, de la même manière, répartir équitablement les quelques tonnes de gaz à effet de serre qu’il nous reste à émettre si l’on veut vraiment limiter le changement climatique?
Dans une interview au magazine “Pour l’éco” de mars 2020, Dominique Méda, sociologue de renom, relaie l’idée : “Nous devons aller vers une société de la sobriété, en instaurant, par exemple, des quotas d’émission de CO2 par personne.”
Le 27 avril sur France Inter, l’économiste Thomas Piketty affirme qu’il faudra bien arriver à suivre le carbone de tous les citoyens, par une sorte de “carte carbone”, sans se cacher derrière la difficulté technique et la question de confiance. “Il faut mettre en place un système de carte carbone de façon à suivre les émissions, et mettre à contribution les plus grosses émissions par rapport aux plus faibles” Il compare la situation d’un point de vue historique. Lors de sa mise en place, l’impôt progressif sur le revenu avait pareillement suscité de terribles craintes : pourtant, qui imagine revenir sur ce mécanisme fiscal aujourd’hui?
Un peu plus tard, le magazine Le 1, donne la parole à Dominique Bourg, lequel confie “La proposition que je fais est celle des quotas : chacun disposerait, pour ce qu’il consomme, d’une quantité limitée de ressources naturelles. Vous avez une sorte de carte bancaire, qui défalque chacun de vos achats de votre « quota ressources », en fonction de son empreinte carbone.”
Toujours en avril 2020, dans leurs “35 propositions” pour un “Retour sur Terre”, un collectif de chercheurs et intellectuels inscrivent en bonne place l’idée de quotas individuels de carbone pour atteindre enfin l’objectif de réduction. Plus précisément, ils proposent de “plafonner démocratiquement, de façon progressive, les consommations d’énergie / matière (et notamment les consommations d’énergie fossile, émettrices de CO2).” Pour eux, “de tels plafonnements pourraient être mis en place non seulement pour les achats directs d’énergie, mais pour tous les produits (chaque produit serait marqué d’un “prix”en énergie / matière, et chaque achat serait reporté sur un compte personnel)”.
La proposition entre dans le champ politique
Delphine Batho et François Ruffin, députés d’oppositions, ont proposé une loi instaurant des quotas individuels pour l’usage de l’avion, présentée le 30 juin 2020. lls s’expliquent dans une conférence de presse disponible sur la toile.
Lundi 17 août 2020, sur France Inter, Laurent Joffrin, récemment passé du journalisme à la politique, appelle de ses vœux, à son tour, le mécanisme de quotas carbone individuels.
L’idée est dans l’air. Alors, si ces personnalités en parlent avec conviction, n’est-il pas temps de sérieusement travailler à la mise en œuvre de l’Allocation Climat? C’est notre projet, et si vous le voulez, aussi le vôtre!